Avec Il ne fait jamais nuit, Juliette Moltes braque les projecteurs sur le mal-être des jeunes adultes, tout en insufflant dans la pièce ce que cette génération a de plus vibrant.
Alors que tout Paris grouille aux terrasses en ce torride début mai, il faut une bonne raison pour s’enfermer, à plus forte raison dans la petite salle obscure de l’Auguste théâtre. C’est tout trouvé avec Il ne fait jamais nuit, une pièce écrite et mise en scène par Juliette Moltes à l’affiche pour quelques dates encore. Sur scène, une quinzaine de comédien·nes jouent une bande de potes, la petite vingtaine, toute la vie devant soi. A priori. Un âge dont on dit beaucoup qu’il est si difficile de savoir ce que l’on veut et ce que l’on est, en oubliant qu’il est souvent encore plus insurmontable d’être limité·e dans sa recherche. On suit Simon, jeune étudiant en médecine par contrainte paternelle plus que vocation, qui se verrait bien danseur, mais surtout libre. Mais aussi tous·tes ses ami·es et l’évolution de leurs relations amico-romantiques sur fond de tracas étudiants et soirées exutoires.
Avec Il ne fait jamais nuit, Juliette Moltes voulait aborder la thématique du suicide, si peu visible au théâtre alors que les chiffres ne transigent pas : une étude menée en 2019 par l’Inserm et l’Université de Bordeaux montre que 23 % des étudiant·es ont eu des pensées suicidaires dans l’année écoulée. La crise sanitaire passée depuis par là n’a rien arrangé. Plus que de chiffres, c’est d’une histoire vécue que la metteuse en scène a tiré son scénario et, plus que d’une mort tragique, ce sont les tentatives de réponse et de reconstruction pour ceux qui restent qui sont mises en lumière.
Peut-être qu’il fait un peu trop chaud dans la salle (comble), peut-être qu’il y a certaines longueurs, peut-être que ça crie un peu trop fort par instants, peut-être que le niveau des comédien·nes est inégal (ce, surtout parce que certain·es sont bluffants de talent). Mais on en retiendra autre chose : des moments de grâce pure, une bande son au milimètre, et surtout, une incroyable énergie : de quoi illuminer des nuits et des nuits. Le public est conquis. Il rit beaucoup, sanglote autant, bref, s’y croit au point de s’étonner d’être cueilli par le crépuscule à la sortie.
Il ne fait jamais nuit, écriture et mise en scène par Juliette Moltes, les 17, 18, 24, 25 mai et les 7 et 8 juin à l’Auguste Théâtre (Paris)