desk globe on table
Photo by Kyle Glenn

Série “Aime-​moi vrai” – Quand Lina trouve l’amour dans une asso­cia­tion d’aide aux migrant·es

“Aime-​moi vrai” – Épisode 3

Plus de dix ans après le lan­ce­ment de Tinder, entre deux swipes à droite et à gauche, fatigue et las­si­tude s’emparent de plus en plus des utilisateur·trices des appli­ca­tions de ren­contre. Celles et ceux qui ont réus­si à trou­ver l’amour dans la vraie vie se livrent dans cette nou­velle série. Dans ce troi­sième épi­sode de notre série, Lina1, une ensei­gnante, alors mariée et âgée de 45 ans, nous raconte com­ment elle est tom­bée amou­reuse d’un deman­deur d’asile, au sein d’une asso­cia­tion d’aide aux migrant·es.

“En 2018, je donne des cours de fran­çais en tant que béné­vole à de jeunes migrants, plus ou moins débu­tants, dans le cadre d’une asso­cia­tion. Quand Hamid1 est arri­vé dans ma classe, je l’ai tout de suite remar­qué : il a un visage par­ti­cu­lier et, sur­tout, pose des ques­tions per­ti­nentes sur la gram­maire fran­çaise, ce qui est rare. Il me demande sou­vent quel jour je serai pré­sente. Je com­prends rapi­de­ment qu’il ne vient qu’à mes cours.

Pendant six mois, nous échan­geons sou­vent sur une mes­sa­ge­rie ins­tan­ta­née. Nous nous pro­me­nons quel­que­fois ensemble aus­si, comme il est héber­gé près de chez moi. Je le sens timide. Mais nos dis­cus­sions sont tou­jours très inté­res­santes. Je constate vite son ouver­ture d’esprit et sa fran­chise. Il est direct, curieux et humble. Un jour, il me confie qu’à 24 ans, il n’a jamais eu de rela­tion sexuelle avec une femme. Au bout de ces six mois, Hamid apprend qu’il sera héber­gé dans une nou­velle région. Dans une sorte de mou­ve­ment de panique, car il a dû ima­gi­ner qu’on ne se rever­rait plus, il me demande, par mes­sage, si j’accepterais de cou­cher avec lui. Il regrette aus­si­tôt ses mots mais je les ai déjà lus. Sa mal­adresse m’amuse beau­coup. Et puis, à sa grande sur­prise, j’accepte.

Je pense, comme lui, que cette rela­tion ne dure­ra pas. Je m’arrange pour qu’on se voie régu­liè­re­ment. Je prends le train pour me rendre dans sa cham­brette, dans un foyer de deman­deurs d’asile. Nous pas­sons quelques heures intenses à chaque fois. Souffrant dans mon mariage, j’ai le sen­ti­ment de revivre, comme une plante qu’on avait trop long­temps négli­gée. Nous tom­bons rapi­de­ment vrai­ment amou­reux. Et au bout d’un an à peu près, nous consi­dé­rons que nous for­mons un vrai couple, d’autant que lui connaît mes pro­blèmes avec mon mari. Il m’écoute avec patience et empa­thie, et ne me demande jamais de choi­sir. De toutes façons, j’aurais fini par quit­ter mon mari un jour et je consi­dère que, de fait, en ayant cette rela­tion extra-​conjugale, je l’ai déjà fait. Je ne lui en parle qu’au bout de deux ans et nous déci­dons de nous sépa­rer. Mes filles sont grandes et sont très heu­reuses d’apprendre que je vis une belle his­toire d’amour.

Aujourd’hui, Hamid a obte­nu le sta­tut de réfu­gié. Il a effec­tué un ser­vice civique, a tra­vaillé en inté­rim et va com­men­cer une nou­velle for­ma­tion qui l’enthousiasme. Il a très envie de deman­der la natio­na­li­té fran­çaise et je l’y encou­rage, car c’est la pre­mière fois qu’il se sent chez lui quelque part. Il habite dans un petit pavillon HLM, tou­jours dans une autre région. Mais il rêve de venir s’installer dans la mienne pour se rap­pro­cher de moi. En atten­dant, je le retrouve tous les week-​ends : c’est ma bulle d’air. Mes filles et ma mère le connaissent et l’apprécient, ain­si que cer­tains amis proches. On ver­ra bien jusqu’où nous mène­ra cette his­toire ! Pour le moment, il est inen­vi­sa­geable, pour moi comme pour lui, qu’elle prenne fin.”

Série “Aime-​moi vrai”
Épisode 2 – Quand Sophie trouve l’amour au sein de sa colocation

  1. le pré­nom a été modi­fié[][]
Partager
Articles liés