ÉDITO. Elle doit avoir douze ans. Treize peut-être. Elle rentre de l’école, pose son sac à dos et s’effondre sur le divan, les yeux baignés de larmes. « Maman, ils ne m’ont pas laissé entrer dans mon école. Ils disent que les filles ne sont pas autorisées », souffle-t-elle dans un sanglot à peine audible. Comme des milliers d’Afghanes, après sept mois sans école, cette jeune fille filmée par sa famille a cru pouvoir enfin y retourner mercredi. Mais quelques heures à peine après leur retour au collège et au lycée, fermés depuis la prise de pouvoir par les talibans mi-août, elles ont dû se lever, remballer leurs cahiers et quitter la classe, laissant une fois de plus sur le pas de la porte rêves et espoirs d’émancipation.
En écrivant ces lignes, nous ne pouvons éviter une question lancinante : les talibans profitent-il du fait que le regard de l’Occident soit tourné vers l’Ukraine pour faire fléchir une fois de plus les droits des femmes et des filles ? « En Afghanistan, surtout dans les villages, les mentalités ne sont pas prêtes », a tenté de justifier le porte-parole du ministère de l’Éducation, Aziz Ahmad Rayan, pour expliquer cette volte-face.
Une explication difficilement acceptable lorsqu’on se souvient qu’avant le retour de l’Émirat islamique au pouvoir, les Afghanes ont pu, certes non sans mal, accéder à l’école et à l’université. Des progrès qui leur avaient permis de se forger une place dans la société afghane. Désormais, à quoi pourra bien ressembler l’avenir de ces filles, qui ont grandi dans un pays ouvert pendant vingt ans à l’éducation pour toutes ? Il est en tout cas de notre devoir de ne pas les abandonner. À nous de faire entendre leurs droits, de mettre en lumière leur enfer. Un enfer qui nous concerne, qui devrait-être l’affaire de tous·tes.
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