L’association SOS homophobie publie ce mardi son rapport annuel sur les LGBTIphobies, montrant que l’année 2022 a été tristement marquée par une hausse des agressions physiques de 28% et une hausse de la haine transphobe de 27% par rapport à l’année 2021.
Alors que la France célèbre les dix ans du mariage pour tous, SOS homophobie lui tend un miroir peu amène en ce qui concerne l’ancrage de la haine envers les minorités de genre ou d’orientation sexuelle. Ce mardi 16 mai, veille de la journée internationale de lutte contre l’homophobie, la transphobie et la biphobie, l’association publie son rapport annuel, épais et édifiant, rendant compte d’un an d’écoute et de soutien au sein de la structure via différents services : ligne téléphonique, chat’écoute, formulaire de témoignage. En 2022, l’association a reçu 1.506 témoignages décrivant 1.195 situations LGBTIphobes en France, « soit une augmentation de 5 % par rapport à 2021 ».
En 2013, année des débats déchaînés et décomplexés au Parlement au sujet du mariage pour tous, un sinistre record de 3.517 témoignages avait été atteint chez SOS homophobie. Dix ans plus tard, les témoignages ont donc diminué de plus de moitié mais montrent une explosion de la violence physique, avec 28% de hausse des agressions physiques par rapport à 2021. Autre hausse vertigineuse : celle des incidents transphobes, qui ont « augmenté de 35 % par rapport à 2020, 27 % par rapport à 2021 ». Pour SOS homophobie, ces derniers chiffres marquent « les répercussions de la banalisation du rejet des personnes trans et non binaires par certaines personnalités politiques, certains médias ou encore des inconnu·es sur les réseaux sociaux ».
Lire aussi l Football : des joueurs de Ligue 1 et Ligue 2 refusent de porter le maillot arc-en-ciel contre l’homophobie
C’est d’ailleurs sur internet que sont commis la majorité des actes LGBTIphobes dans leur ensemble (17% d’entre eux). Suivent ensuite le cercle familial (15%), les commerces et les services (13%), les lieux publics (12%), le voisinage (9%) et le milieu scolaire (6%). Pour illustrer les situations d’intolérance et de souffrance derrière les chiffres, Causette vous propose ici une (petite) sélection des témoignages décrits par SOS homophobie dans son rapport.
Transphobie /violences physiques
“Fanny a 16 ans et vit en Isère. Elle se promène avec une copine, trans comme elle. Deux garçons leur demandent si elles sont « des filles ou des garçons », puis commentent que « son pote a l’air d’une pute ». Il suffit d’un soupir, Fanny reçoit plusieurs coups de poing au visage. L’un des deux garçons la tire par-derrière, elle tombe à terre, ils lui donnent des coups de pied dans la tête. Fanny n’a pas voulu aller aux urgences, ni porter plainte.”
Lesbophobie /cadre médical
“Tiphaine se rend à l’hôpital dans le Finistère, dans le cadre d’une consultation de
gynécologie pour suspicion d’endométriose. Lorsque la gynécologue lui demande s’il y a un risque de grossesse, Tiphaine indique que non, car elle est en couple avec une femme cis depuis plusieurs années. La gynécologue conclut la discussion en répondant : « Donc pas de pénétration », refuse d’examiner Tiphaine par échographie endovaginale et met fin à la consultation.”
Homophobie /milieu scolaire /travail
“Omar est professeur dans un collège. Au mois de février, lui et son petit ami subissent du harcèlement en ligne sur le compte Instagram de ce dernier : « Tu sors avec le prof, gros DEP » ; « Viens devant le collège et assume. » Le chef de l’établissement prend ce harcèlement très au sérieux. Son compagnon a déposé plainte au commissariat, qui a été très peu coopératif. Il vit très mal ces événements et s’en veut, car il se dit fautif d’avoir mis son petit ami dans cette situation à cause de photos sur Instagram.”
Homophobie /xénophobie
“Nino est tranquillement installé à la terrasse d’un café, lorsque deux hommes passent et parlent de lui en utilisant des insultes gayphobes et xénophobes dans le même commentaire : « Cette espèce de petit pédé de Turc. »“
Biphobie /milieu familial
“Alors que ses parents semblaient accepter sa bisexualité, Léa, collégienne en région
parisienne, subit de la violence depuis qu’elle leur a annoncé sortir avec une fille. Ses parents s’opposent fortement à leur relation, quitte à interdire à leur fille de voir sa
copine. Voulant contrôler le plus possible ses relations, iels lui ont confisqué son téléphone et ont supprimé son adresse mail. Léa est complètement perdue : « Je ne sais plus quoi faire pour que tout redevienne comme avant, sans rompre avec ma petite amie. »“
Homophobie /religion
“Cyril habite Paris, mais se rend souvent en banlieue pour voir son compagnon. Lorsqu’ils se promènent, ils se font régulièrement agresser par des jeunes du quartier. Récemment, alors qu’ils marchaient dans la rue, ils ont été insultés par un groupe de quatre jeunes garçons et une fille. Les mots étaient très violents : « Espèces de pédales hérétiques et sauvages. » Cyril et son compagnon ont courageusement essayé d’établir le dialogue, mais en vain. Ce groupe ultra-religieux, selon les mots de Cyril, leur opposait le Coran, citations à l’appui, pour justifier leurs insultes. Iels leur ont même craché dessus. Cyril nous fait part de son exaspération, mais ne veut pas porter plainte, persuadé que cela ne sert à rien. SOS homophobie lui a, bien entendu, expliqué l’importance d’une telle démarche et l’a encouragé à la poursuivre.”
Lire aussi l “Sortir de l’ombre”, un documentaire inédit sur l’homophobie aux Antilles