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© Anthony Tran

Santé men­tale : « des dizaines de mil­liers d’enfants » sous psychotropes

Selon le der­nier rap­port du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) dévoi­lé ce lun­di en exclu­si­vi­té par Le Parisien, la consom­ma­tion et la pres­crip­tion de médi­ca­ments psy­cho­tropes chez les mineur·es sont en forte augmentation. 

Le nou­veau rap­port choc du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) ren­du public ce lun­di 13 mars et dévoi­lé en exclu­si­vi­té par Le Parisien dresse un constat alar­mant du mal-​être des jeunes de 6 à 17 ans. Intitulé « Quand les enfants vont mal, com­ment les aider ? », les 190 pages de ce rap­port montrent que les enfants en France sont sou­mis à davan­tage d’épisodes dépres­sifs ou de troubles de l’humeur. Il leur est trop sou­vent admi­nis­tré, et à hautes doses, des psy­cho­tropes modi­fiant leur acti­vi­té psy­chique, leur com­por­te­ment et leurs émo­tions, selon le quotidien.

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© Capture d’écran Le Parisien

« Nous pen­sions que, en France, on pres­cri­vait tra­di­tion­nel­le­ment peu aux enfants, mais les chiffres ont dou­blé entre 2010 et 2021, et cela nous place par­mi les pays les plus pres­crip­teurs d’Europe », a expli­qué Sylviane Giampino, la pré­si­dente du Conseil de l’enfance et de l’adolescence du HCFEA, éta­blis­se­ment public pla­cé auprès du Premier ministre, d’après Le Parisien.

À en croire les chiffres de la Cnam (Caisse natio­nale de l’assurance mala­die) et de l’ANSM (Agence natio­nale de sécu­ri­té du médi­ca­ment et des pro­duits de san­té), pré­sen­tés dans le rap­port, entre 2014 et 2021, les pres­crip­tions d’antipsychotiques aux enfants ont bon­di de 48,54 %, tan­dis que celles d’antidépresseurs bon­dis­saient de 62,58 %, celles de psy­cho­sti­mu­lants de 78,07 % et celles d’hypnotiques et de séda­tifs de 155,48 %. Les psy­cho­tropes (médi­ca­ments qui modi­fient l’activité psy­chique et agissent donc sur les com­por­te­ments, per­cep­tions, émo­tions) les plus pres­crits aux mineur·es res­tent les hyp­no­tiques et les anxio­ly­tiques : ceux-​ci seraient désor­mais consom­més par 2,72 % de la popu­la­tion fran­çaise âgée de 6 à 17 ans, contre 2,01 % il y a dix ans.

Un défi­cit des autres formes d’aide

Ce sont donc bien « des dizaines de mil­liers d’enfants » âgés de 6 à 17 ans aux­quels les méde­cins pres­crivent sou­vent des trai­te­ments réser­vés, en France, à l’adulte. « Il fau­drait être aveugle aujourd’hui pour ne pas faire de la san­té men­tale des enfants et ado­les­cents une prio­ri­té et une urgence des poli­tiques de san­té, comme le recom­mande l’OMS », constate Sylviane Giampino, tou­jours d’après le quotidien. 

© Capture d’écran Le Parisien

En effet, 40 % des pres­crip­tions de psy­cho­tropes faites à des enfants par des méde­cins de ville concernent des trai­te­ments nor­ma­le­ment réser­vés aux adultes. Même chose à l’hôpital, dont 67 % à 94 % des pres­crip­tions concernent aus­si des trai­te­ments réser­vés aux adultes, selon les chiffres rap­por­tés par Le Parisien. « Nous ne remet­tons pas en cause l’utilité de ces médi­ca­ments ni leur pres­crip­tion, mais nous sommes pour un rééqui­li­brage et aler­tons sur le défi­cit des autres formes d’aide et de soin appor­tés, et cela est bien anté­rieur à la crise du Covid », pré­cise Sylviane Giampino au quotidien. 

D’autant qu’en 2019, la pédo­psy­chiatre à la Maison de Solenn, Marie-​Rose Moro, alar­mait déjà à ce sujet en pré­ci­sant, dans Le Parisien, que ces médi­ca­ments « ont sou­vent des effets secon­daires impor­tants et ne sont par­fois pas très adap­tés au cer­veau de l’enfant. Avant de se poser la ques­tion de les pres­crire, il fau­drait donc pou­voir ren­con­trer le jeune patient plu­sieurs fois, régu­liè­re­ment, pou­voir réa­li­ser une éva­lua­tion glo­bale. Mais la plu­part du temps, le sui­vi et l’accompagnement ne sont pas suf­fi­sants. Il arrive que les médi­ca­ments servent même à espa­cer les séances chez le psy ».

À lire aus­si I Hôpital public : quatre syn­di­cats de psy­chiatres appellent à une grève

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