Selon le dernier rapport du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) dévoilé ce lundi en exclusivité par Le Parisien, la consommation et la prescription de médicaments psychotropes chez les mineur·es sont en forte augmentation.
Le nouveau rapport choc du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) rendu public ce lundi 13 mars et dévoilé en exclusivité par Le Parisien dresse un constat alarmant du mal-être des jeunes de 6 à 17 ans. Intitulé « Quand les enfants vont mal, comment les aider ? », les 190 pages de ce rapport montrent que les enfants en France sont soumis à davantage d’épisodes dépressifs ou de troubles de l’humeur. Il leur est trop souvent administré, et à hautes doses, des psychotropes modifiant leur activité psychique, leur comportement et leurs émotions, selon le quotidien.
« Nous pensions que, en France, on prescrivait traditionnellement peu aux enfants, mais les chiffres ont doublé entre 2010 et 2021, et cela nous place parmi les pays les plus prescripteurs d’Europe », a expliqué Sylviane Giampino, la présidente du Conseil de l’enfance et de l’adolescence du HCFEA, établissement public placé auprès du Premier ministre, d’après Le Parisien.
À en croire les chiffres de la Cnam (Caisse nationale de l’assurance maladie) et de l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé), présentés dans le rapport, entre 2014 et 2021, les prescriptions d’antipsychotiques aux enfants ont bondi de 48,54 %, tandis que celles d’antidépresseurs bondissaient de 62,58 %, celles de psychostimulants de 78,07 % et celles d’hypnotiques et de sédatifs de 155,48 %. Les psychotropes (médicaments qui modifient l’activité psychique et agissent donc sur les comportements, perceptions, émotions) les plus prescrits aux mineur·es restent les hypnotiques et les anxiolytiques : ceux-ci seraient désormais consommés par 2,72 % de la population française âgée de 6 à 17 ans, contre 2,01 % il y a dix ans.
Un déficit des autres formes d’aide
Ce sont donc bien « des dizaines de milliers d’enfants » âgés de 6 à 17 ans auxquels les médecins prescrivent souvent des traitements réservés, en France, à l’adulte. « Il faudrait être aveugle aujourd’hui pour ne pas faire de la santé mentale des enfants et adolescents une priorité et une urgence des politiques de santé, comme le recommande l’OMS », constate Sylviane Giampino, toujours d’après le quotidien.
En effet, 40 % des prescriptions de psychotropes faites à des enfants par des médecins de ville concernent des traitements normalement réservés aux adultes. Même chose à l’hôpital, dont 67 % à 94 % des prescriptions concernent aussi des traitements réservés aux adultes, selon les chiffres rapportés par Le Parisien. « Nous ne remettons pas en cause l’utilité de ces médicaments ni leur prescription, mais nous sommes pour un rééquilibrage et alertons sur le déficit des autres formes d’aide et de soin apportés, et cela est bien antérieur à la crise du Covid », précise Sylviane Giampino au quotidien.
D’autant qu’en 2019, la pédopsychiatre à la Maison de Solenn, Marie-Rose Moro, alarmait déjà à ce sujet en précisant, dans Le Parisien, que ces médicaments « ont souvent des effets secondaires importants et ne sont parfois pas très adaptés au cerveau de l’enfant. Avant de se poser la question de les prescrire, il faudrait donc pouvoir rencontrer le jeune patient plusieurs fois, régulièrement, pouvoir réaliser une évaluation globale. Mais la plupart du temps, le suivi et l’accompagnement ne sont pas suffisants. Il arrive que les médicaments servent même à espacer les séances chez le psy ».
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