« Il n’y a pas d’obligation à vivre ». Par ces mots, le Comité Consultatif National d’Éthique entérine l’évolution de notre société sur le droit à mourir dans la dignité, et donc à être assisté dans ce dernier acte si nécessaire.
ÉDITO. « Le respect du droit à la vie ne vaut pas devoir de vivre une vie jugée insupportable par celui ou celle qui la traverse. Il n’y a pas d’obligation à vivre. » Dans un avis rendu public mardi 13 septembre, le Comité Consultatif National d’Éthique (CCNE) a ouvert la porte à une rupture dans l’accompagnement de la fin de vie en France.
En 2013, le CCNE considérait qu’il était « dangereux pour la société que des médecins puissent participer à donner la mort » et la loi Claeys-Leonetti qui encadre depuis 2016 la fin de vie s’était reposée sur cet avis. Mais aujourd’hui, le CCNE prend acte des limites de cette loi, qui ne prévoit la sédation profonde et continue du ou de la patient·e seulement lorsque ses pronostics vitaux sont engagés à court terme. Le CCNE écrit donc : « Il existe une voie pour une application éthique d’une aide active à mourir. » Par aide active à mourir, il faut comprendre un accompagnement au suicide assisté ou l’appel à un médecin pour donner la mort à un·e patient·e qui le demande. C’est ce procédé auquel le réalisateur Jean-Luc Godart a eu recours en Suisse, pays qui l’autorise, le même jour que le CCNE rendait son avis.
Bien sûr, pour le CCNE, une évolution de la loi devra se faire avec des gardes-fous : « Si le législateur décide de légiférer sur l’aide active à mourir, la possibilité [d’une] assistance au suicide devrait être ouverte aux personnes majeures atteintes de maladies graves et incurables, provoquant des souffrances physiques ou psychiques réfractaires, dont le pronostic vital est engagé à moyen terme. » L’institution, composée de médecins, philosophes, théologien·nes, juristes, chercheur·euses ou encore membres de la société civile, a aussi émis des conditions à cette avancée possible de la loi : pour elle, légaliser le suicide assisté n’a de sens que si, en parallèle, notre pays se donne les moyens de faire respecter la loi en termes d’accès aux soins palliatifs, encore difficiles à obtenir pour certain·es patient·es, en intensifiant leur offre sur l’ensemble du territoire.
En somme, le CCNE signe là un avis mesuré et courageux, qui s’inscrit dans la reconnaissance d’« une demande dans notre société en faveur de l’aide active à mourir », à travers « des propositions de loi, des courants associatifs, des enquêtes d’opinion », comme il le précise. Ce positionnement a été entendu par le président de la République Emmanuel Macron qui, s’il n’a pas « de position officielle » sur le sujet, a indiqué accepter la préconisation du CCNE : celle du lancement d’une consultation citoyenne sur le sujet. Lancée en octobre, elle devrait durer six mois. Un signal favorable pour mener à bien l’évolution législative demandée par nombre de nos compatriotes, si tant est que cette consultation citoyenne ne finisse pas en eau de boudin comme la Convention citoyenne sur le climat.
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